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Visite la Mauny

Chai La Mauny – Trois Rivières par Marianne

Nous avons eu la chance de visiter les chais avec Daniel Baudin lors de notre voyage en Martinique. Nous avons d’abord pu goûter les nouveautés de la série initialement prévue pour les bars : Rhum vieux de l’Océan, Cannes Brulées, double wood et 55 Origine. En parlant de cette série, et après avoir évoqué l’article de Durhum sur l’utilisation de l’eau de mer, la réponse de Virginie Pouppeville (responsable qualité et développement) est la suivante : « Nous sommes tellement contrôlés par l’AOC, par les douanes et par la répression des fraudes que, vraiment, je ne crois pas que quelque chose du genre (note : nous évoquions le blanc acacia et le Rhum vieux de l’Océan) pourrait passer. » Le groupe La Mauny-Trois Rivières revendique le droit à l’innovation, mais, en explorant de nouveaux chemins, soulève des polémiques dans l’univers des amateurs très éclairés du rhum…

Ensuite, nous avons pu déguster une belle nouveauté Trois Rivières à venir pour la fin de l’année (qui viendra clore une série entamée). Au rayon découverte, La Mauny travaille en ce moment sur les différents temps de maturation des bois de ses fûts de chêne (temps où le bois est laissé sur place, après la coupe de l’arbre, durant lequel les intempéries viennent modifier la nature du bois et le faire vieillir). Et ce n’est pas peu dire que le résultat est saisissant puisque nous avons pu gouter deux rhums âgés de deux ans, l’un dans un fût dont le bois avait maturé 36 mois et l’autre dans un fût dont le bois avait maturé 50 mois, et la différence était flagrante : le fut maturé 50 mois avait une complexité déjà étonnante pour son jeune âge, le boisé accompagnant à merveille la fougue du blanc de base. Deux très belles découvertes, car le 36 mois était aussi excellent, et un très bon exercice de pédagogie.

Enfin, pour conclure en beauté cette très belle matinée, nous avons pu goûter un très vieux rhum dégusté à l’aveugle et dont nous n’avons pas eu beaucoup d’info, si ce n’est qu’il avait bien plus de dix ans, qu’il était à 54°, et qu’il était absolument incroyable.

Si Chantal Comte a « su trouver des pépites dans les chais de la Mauny », il en reste quelques-unes… Mais la marque veut-elle proposer, par elle-même, de tel rhum ? Nous l’espérons, car cette visite nous a confirmé la maitrise de Daniel Baudin à faire des vieux de grande qualité.

En conclusion de ce très agréable moment chez La Mauny, très enrichissant au niveau pédagogique, il se trouve que nous avons préféré déguster le brut de fût mystère que la gamme bar, mais en serait-il de même pour nos proches ? C’est une question importante car il faut éviter de tout juger par le prisme des goûts que nous avons pu développer.

Mais nous avons eu la chance de visiter d’autres maisons durant le séjour et profiter de la richesse de l’île en la matière :

L’Habitation Saint-Etienne par Marianne

HSE

Après avoir échangé avec Cyril Lawson, principalement sur le travail des fûts et plus précisément de la chauffe, thème à la mode s’il en est (Profil 105-107 chez Neisson ou l’Alligator chez Karukera – pour ne citer qu’eux). HSE a par exemple développé ses propres programmes de chauffe (la chauffe n’est pas uniforme dans le temps, elle varie sur la durée du programme pour développer tel ou tel arôme) pour coller exactement au type de rhum voulu. Nous avons pu ensuite déguster et (re)découvrir une bonne partie de la gamme : la cuvée 2016 (qui nous a semblé moins fine, plus sucrée que la mono-parcellaire), la gamme classique – VSOP-XO-Small cask 2007 (une véritable bombe), le finish Sauternes et le Marquis de Terme. L’ensemble est vraiment bien fait, avec des produits qui ont tous leur caractère tout en gardant la trame HSE. Nous avons fini la dégustation classique par les deux bruts de fût 2007 (chêne US et FR), ces deux bouteilles ont chacune une véritable personnalité propre et sont toutes deux de grande qualité. Au niveau des exclus, Cyril nous a fait un découvrir le Skouras, que nous n’avions pas eu la chance de gouter et une nouvelle finition, en brut de fût, qui en surprendra plus d’un : en effet, le finish se sentait au nez mais la bouche était toujours assez puissante. La question qui se posera (si la dégustation rapide sur le comptoir se vérifie) : dans un rhum avec finish, est-ce la réduction ou les finishs qui estompent la force du rhum ?

Trois Rivières

Lieu sympathique dans une ville qui l’est également, le passage a été intéressant avec une jolie dégustation (il n’y avait pas énormément de monde à ce moment là, donc j’ai pu avoir droit à une belle sélection) : Le 12 ans, le millésime 2000 et les triples millésimes (1999-2000-2009(10)). Les quatre rhums étaient bons, réussis, mais trop réduits et malheureusement (attention il s’agissait d’une dégustation rapide) pas assez complexes (les deux points étant sûrement liés). Je voulais re-gouter le cask strength 2006 mais il n’était pas disponible à la dégustation et, surtout, le prix était passé d’environ 47€ en mars 2018 à 110€ fin juillet 2019. Alors j’imagine que les stocks commencent à faiblir, mais un prix plus que doublé en 18 mois, c’est trop.

Neisson

Après avoir échangé en début d’année avec Grégory Vernant et Alex Boby, nous avons eu la chance de vivre une dégustation de folie, accompagné d’Alex, avec quelques uns des plus grands crus de la maison : 15 ans, 18 ans, 1997 anniversaire Velier et l’Armada 1995… Pas de suspense, l’ensemble était de très très grande qualité avec une mention spéciale pour le 1997 qui avait un côté très gourmand, une grande complexité, une belle fraîcheur et une longueur de folie. Le 15 ans est également un rhum de grande qualité qui fera le bonheur de ceux qui peuvent se l’offrir. En bonus, nous avons pu goûter le futur single cask 2003, habillé dans une bouteille magnifique, qui sortira sous peu et qui devrait, lui aussi, faire parler de lui tant il est de qualité. Un très grand merci à Alex pour le temps qu’il nous a consacré à quelques jours de ses vacances et bravo pour le travail.

JM par Marianne

JM

Alors autant la visite est à faire absolument, tant le lieu est magique et la visite très bien faite, autant j’ai été déçu par leurs rhums. J’ai pu gouter le jungle Macouba, première version du blanc premium JM, qui était bien, le VSOP qui est toujours réussi, mais les vieux de la gamme ont été très décevants : le XO, le 10 ans (2008) et le 15 ans ont chacun leurs personnalités mais sont trop courts et pas assez gourmands. Il faudrait sûrement les réessayer dans de meilleures conditions, mais ce n’était pas incroyable et c’est dommage pour cette grande maison historique qui a du mal actuellement à faire parler d’elle. Petite mention pour la cuvée 1845 qui sortait du lot et qui peut faire un joli cadeau avec sa belle carafe

La Favorite

Après avoir croisé Franck Dormoy (merci Vianney !), qui nous a fait une visite au top, dont nous parlerons ailleurs, nous avons eu la chance de pouvoir déguster une bonne partie des cuvées de l’illustre petite distillerie familiale. Les blancs tout d’abord, avec l’Authentique, le blanc « de base » qui est d’une grande gourmandise, réussi, puis les deux séries spéciales avec la Rivière Bel-Air 2018 plus sur le sucre, le fruit et la fleur puis la Digue, qui est elle plus végétal, et qui m’a paru meilleure qu’au Rhum Fest. Ensuite le 3 ans, comme l’Authentique, très doux –sucré, puis la nouvelle cuvée Brière de l’isle, qui sortait quelques jours après notre passage et que nous avons eu la chance de gouter, qui était bien équilibrée et très réussie (spoiler : une note de dégustation devrait arriver sous peu). Est ensuite arrivée l’étendard de la maison, la plus que fameuse Flibuste, qu’on ne présente plus, et enfin le 2010, qui détonnait par sa vivacité et son boisé, qui devrait ravir les amateurs de rhums plus secs et plus boisé. En bonus, trois belles découvertes : la cuvée Lulu, présentée au Rhumfest aux privilégiés (dont je n’ai pas fait parti ^^), un assemblage de rhums âgés, qui est une version « vieillie » du 2010 puisqu’elle est elle aussi bien boisée, mais avec cette pointe de gourmandise propre à la maison. Enfin, deux produits plus expérimentaux avec un « élevé sous bois – brut de fut » qui rappelait un peu le Genesis de Longueteau tout en étant plus rond, un beau produit qui aurait toute sa place chez votre caviste et un brut de colonne, le blanc de base de la cuvée des frères de la Côte qui a fini sa traversée sur le Très Hombres, un blanc magnifique à 69°, qui laisse présager d’un brut de colonne à venir, un jour prochain, de la Favorite.

Conclusion

Ces différentes visites ont confirmé la maitrise des différents acteurs à faire des rhums de très grandes qualités. Les dégustations « classiques » ont été, dans l’ensemble, réussies, mais les produits goûtés en off étaient tous excellents, et plus forts en alcool. Pour l’anecdote, lors de la venue de Marc Sassier (St James-Bally) à Paris en mai, nous avions pu gouter un St James en brut de fût de 2011 et à environ 60° ; il était magnifique. Il est évident que tous les rhums ne peuvent pas finir en single cask & brut de fût, mais nous pensons qu’il y a de la place pour un spectre plus large de degré d’alcool. De notre point de vu, il nous semble important que chaque marque puisse proposer un brut de fût, plus concentré que le reste de sa gamme, de manière à ce que l’amateur trouve l’aspect brut de son rhum. Enfin, et nous l’avons bien vu chez La Mauny et la Favorite, la qualité n’attend pas forcément le nombre des années et un fût bien travaillé peut donner des rhums de grande qualité très rapidement (deux ans pour ceux que nous avons pu goûter).

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