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A quelques jours des fêtes de fin d’année, petit retour sur une partie la gamme 2022 des Single cask de Plantation. Rappel du principe : chaque année, Plantation propose à ses cavistes partenaire (en ligne ou physique) de choisir des rhums parmi une large sélections de provenances et de finitions, pour des embouteillages en single cask. Il existe plusieurs fûts pour chaque référence, si bien que vous pouvez retrouver ces embouteillages « exclusifs » chez différents cavistes à travers l’Europe, sur des fûts différents.
D’autre part, single cask oblige, le Jamaïcain 2007 ou le Trinidad 2009 croisé chez nos cavistes isérois (l’Échansons à Crolle, par exemple – pour ne pas les citer) ne sera pas exactement le même que celui dispo sur le net ou chez votre caviste de quartier. Mais le profil devrait logiquement rester très proche. Enfin, niveau prix, on est en général bien en dessous des 100 euros.
Face à la très large gamme (une bonne quinzaine de références), nous avons choisi de nous intéresser aux provenances phares de cette année : Trinidad/Jamaïque/Fiji. Niveau finition, on le répète assez souvent, nous ne sommes pas les plus grands fans du principe. Cette année, exit les finitions bière mise en avant l’an passé, on retrouvera essentiellement des finitions vins (fortifié ou non) et whisky.

On commence la dégustation par trois Trinidad.
Comme d’habitude chez Plantation, le premier vieillissement a été tropical, le second dans les fûts et les chais de Ferrand à Cognac et enfin une finition. Les trois auront connu une finition en fût de vin : sauvignon pour le 2008, le classique sauternes pour le 2011 et tokaj (un vin moelleux hongrois) pour le 2009. Il faut ajouter que, contrairement au 2008, le 2011 et le 2009 sont légèrement « dosés » (dans le jargon de Plantation) c’est-à-dire avec un ajout de sucre (5g/litre).

Trinidad 2008 sauvignon

Vieillissement sous climat tropical pendant 11 ans (bourbon) puis continental pendant 2 ans (Cognac) et enfin 9 mois de finition en ex-fût de sauvignon blanc et réduit à 48%

Dans le verre le jus est très clair.
Le nez est plutôt sage et classique : vanille, miel, avec un coté beurré/pâtissier qui apporte de la gourmandise.
En bouche on retrouve cet aspect facile et léger, avec toujours ce côté vanillé et pâtissier. Ensuite, des fruits blancs font leur apparition.
Ce profil séducteur, la réduction à 48% et le prix raisonnable pour l’époque (75€ chez VnB par exemple) en font un rhum ultra accessible destiné à un public plutôt novice sur ce type de produit.
Notre note : 81

Trinidad 2011 sauternes

Vieillissement sous climat tropical pendant 9 ans (bourbon) puis continental pendant 2 ans (Cognac) et enfin 3 mois de finition en ex-fût de Sauternes. Réduction à 43% et dosage à 5g/litre.

Dans le verre le jus ressemble beaucoup au précédent.
Au nez, le premier temps ressemble aussi au précédent avec un couple vanille/miel. L’ouverture lui apporte un peu plus de pep’s que le précédent, avec un coté salade de fruit tropicaux (qu’on retrouve dans certain TDL).
En bouche un arôme domine tous les autres, une pêche (un peu chimique) rappelant plus les bonbon Haribo pêche que les fruits du verger. Des notes plus acidulées et une note plus grasse (frangipane) complètent un profil résolument gourmand. A noter une belle intensité dans le verre malgré le degré plutôt bas.

Profil plus intéressant, moins classique que le précédent, encore très accessible autour d’une note dominante originale qui nous a plu, mais qui pourra être clivante, voir lassante. Là encore on est sur un prix très sage, entre 50 et 65 euros selon les revendeurs.
Notre note : 83

Trinidad 2009 tokaj

Vieillissement sous climat tropical pendant 10 ans (bourbon) puis continental pendant 2 ans (Cognac) et enfin 1 an supplémentaire de finition en ex-fût de patricius tokaj ce qui en fait une finition plutôt longue. Réduction à 52% et dosage à 5g/litre.

Dans le verre, le jus tranche avec les précédents, il est plus ambré et les larmes sur le verre sont épaisses.
Le nez est dominé par une belle note de café, on retrouve de la vanille et du chocolat noir qui apporte de l’amertume ainsi que des notes plus torréfiées.
En bouche c’est collant, on retrouve un profil de Trinidad opposé au deux précédents. Celui-ci est beaucoup plus boisé, les fruits sont présents mais très cuits, voir brulés. Le tout est entouré d’un voile de fumée voir de cendre.
Un caramel brulé persistant nous accompagne sur une belle longueur.

L’alcool est parfaitement intégré et le degré supérieur aux autres Trinidad fonctionne très bien avec ce profil. Un Trinidad plus dans nos goûts que les précédents, qui n’est pas sans rappeler le très réussi batch 4 de Maison du Rhum, un de nos coup de cœur 2021. On finira en parlant de la douceur du prix : 85€.
Notre note : 88

On change d’île et d’univers avec la suite.

Fiji 2001 Rozelieures

Nous sommes ici sur le plus long vieillissement de la série : 19 ans en fût de bourbon sous climat tropical puis 1 an sous climat continental en fût de cognac et enfin une finition de 4 mois en ex fût de whisky Rozelieures déjà croisé en finition chez HSE. Réduit à 46%, non dosé. Avec un taux d’esters à 239 g/hlAA c’est le plus concentré de la série.

Le nez est d’abord médicinal (camphre) puis les fruits tropicaux font leur apparition (banane en tête). Une certaine salinité complète le nez.
La bouche nous surprend par une attaque assez sèche, le bois est logiquement bien présent, de la vanille et des fruits tropicaux arrivent ensuite pour contrebalancer. Une petite amertume sur le bois et des notes herbacées complètent le profile.

Un rhum plus sec en bouche que sur les habituels Fiji. Ce Plantation a été sélectionné, entre autres, par Excellence Rhum. On est donc sur un rhum avec un vieillissement de plus de 20 ans à moins de 100€ !
Notre note : 85

Place à la Jamaïque maintenant avec un Clarendon et un Long Pond. Deux expressions issues des chais de National Rum of Jamaica, propriété (en partie) de Ferrand, la maison mère de Plantation.

Jamaica 2007 Ironroot Républic Bourbon

On est sur un Clarendon qui a passé 11 ans en fût de bourbon sous climat tropical, puis 3 ans en vieillissement continental (cognac) et enfin retour en ex-bourbon pour une finition de 5 mois. 51%, pas de dosage.

Beaucoup de douceur ce dégage du nez, l’alcool semble inexistant, les fruits sont compotés, la douceur est encore renforcée par un lait d’amande douce et de la vanille.
En bouche toujours la même douceur sur les fruits, ce côté laiteux et vanillé et cet alcool extrêmement discret.

Un profil résolument gourmand qui plaira au plus grand nombre et qui en fait une belle porte d’entrée vers la Jamaïque pour environ 65€
Notre note : 83

Jamaica long pond 2009 Spanish Orange Wine

Vieillissement 8 ans tropical (bourbon) 4 ans continental (cognac) et une finition assez improbable de 7 mois en fût de vin orange espagnol (un vin de cépage blanc macéré avec les peaux et les pépins à la manière d’un vin rouge). La mark est VRW (la même que le fameux Vale Royal), il est proposé non dosé à 53%.

Au nez on a dans un premier temps des notes de caoutchouc, de plastique brulé plutôt acide qui laisse vite place à des notes de fruits (orange confite et agrumes) sans toutefois perdre son identité tropicale. Les fruits à coques qui nous avaient plu dans le Vale Royal sont également présents, avec de la vanille.
En bouche retrouve du bois, des fruits, de la vanille et des épices douces (cannelle), l’orange amère accompagnée d’un chocolat noir qui renforce une belle amertume plutôt agréable.

Un profil Long Pond assez surprenant, avec ses notes d’agrumes en plus des marqueurs habituels.
Notre note : 87

Conclusion

Pour conclure nous avons ici à faire à une belle sélection, très dense qualitativement, avec deux jus qui sortent du lot pour nous : le Trinidad Tokaj et le Long Pond Orange Wine cask.

Il reste trois points sur lesquels il nous semblait important de revenir :
Tout d’abord le dosage. Même si Plantation est totalement transparent sur le sujet, même si cela est fait avec des sucres et caramels locaux dans le respect du produit, nous avons du mal à adhérer à la pratique, encore plus dans des quantités aussi faibles (5g/litre sur les jus dégustés ici). L’immense majorité des consommateurs ne verra sans doute pas la différence. On est sur des doses symboliques mais le symbole est important.
Ensuite, sur le finish, nous avons dit en introduction que nous n’étions pas les plus grands fans de la pratique. Mais force est de constater que lorsque c’est bien fait, ce qui est le cas ici, cela peut apporter un plus sans dénaturer le rhum original. Saluons donc la justesse des finishs effectués ici !
Enfin, dernier point : les prix. Toute la gamme se situe entre 50 et 100 euros, pour des single casks allant de 12 à 20 ans ( avec des vieillissements largement tropicaux). C’est assez exceptionnel à une époque où les prix semblent ne jamais cesser de monter. Plantation est un peu seul au monde sur ce créneau à la fois qualitatif et accessible et semble devenir, au fil du temps, LA porte d’entrée vers le rhum de mélasse.

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